Augustin, le plus grand penseur de son temps, fait acte d'humilité en avouant son (qui affirme du même coup notre) incapacité à connaître (comprendre) l'origine ultime du mal.
Il reprend en ce sens les réserves de l'Ecritures, qui n'évoque explicitement l'origine du mal, qu'en rapport avec l'histoire humaine. Si le diable est selon le dire de Jésus "meurtrier dès le commencement, [...] menteur et le père du mensonge." (Jn 8:44) la Parole n'explique cette origine qu'à propos de la chute de l'homme (Genèse 3). Les textes prophétiques qui semblent évoquer l'apparition du mal chez le diable (ex. Ez 28:14 et s.) restent sobres.
Cette histoire nous concerne, mais ne nous appartient pas. Augustin, dans son approche, nous donne l'exemple d'une démarche orthodoxe, qui ne s'élance pas dans la spéculation, mais reste reliée à chaque étape à la révélation scripturaire.
Nous ne comprenons pas l'origine du Mal, mais nous savons, à la suite d'Augustin, que « Dieu n'est pas l'auteur du Mal » (BRUN, p.93). Contrairement aux dérives modernes de la philosophie naturelle et de la théologie qu'elle a engendrée (XVII-XIXe s.), Augustin s'efforce constamment de soumettre humblement sa réflexion philosophique et théologique à la tutelle de l'Ecriture. Il croit afin de comprendre et non l'inverse.
Ceci, l'amène aussi à réaffirmer l'impuissance de l'homme à se sauver lui-même. Seul la Grâce de Dieu pourvoit au salut. Dans "contre Pélage" (qui affirmait que nous contribuons au salut, par nos oeuvres), il s'inscrit comme le précurseur logique des Réformateurs et de leur devise sola fide, sola deo gratia, telle qu'Ephésiens 2 : 8-10 le proclame.