Lecture complémentaire d'E. Bréhier, Histoire de la philosophie p 587 ss
La « construction thomiste » (une « forteresse d'idées » d'après J. Brun !) présente plusieurs thèmes essentiels dans lesquels l'influence d'Aristote est déterminante (tentative de synthèse aristotélisme/révélation chrétienne) :
- la réflexion sur les rapports foi/raison : son point de vue est assez statique : il y a des vérités philosophiques accessibles à l'intelligence humaine et des vérités de foi qui excèdent son pouvoir. Aucun progrès ne peut conduire les unes aux autres. On ne peut pas démontrer les vérités de foi (la nécessité de la grâce par exemple).
De plus, la vérité ne saurait être contraire à la vérité. Et si par extraordinaire une vérité de foi contredit une vérité de raison ou inversement, la vérité de foi sera choisie, a priori et parce que pour St Thomas, notre raison limitée ne peut pas nous permettre de tout comprendre dans ce domaine. S'il y a contradiction, c'est que la prétendue « vérité de raison » est une erreur.
- La théorie de la connaissance: Cf Bréhier, (p588)
Ici les choses créées ne sont pas des signes de la présence divine mais de simples effets qui permettent de remonter, au moyen d'un pénible raisonnement, jusqu'à la Cause première qu'est Dieu (le moteur non mû), que nous ne saisissons pas par elle-même mais par rapport à ses effets. (doctrine empruntée à Aristote)
Pour lui il n'y a aucune séparation entre les différents aspects du réel, ceux qui nous sont donnés par la raison et ceux qui nous est donnée par la révélation.
Cette conception permet la démonstration de l'existence de Dieu :
Celle-ci repose sur 5 voies, selon une démonstration qui va de l'effet à la cause :
1. Tout ce qui est mû est mû par autre chose. On remonte ainsi au Premier moteur, non mû, Dieu.
2. De la même manière, Dieu est la cause première nécessaire de toute cause.
3. Toutes choses, périssables et éphémères ne sont pas nécessaires et pouvaient aussi ne pas être. Seul Dieu est nécessaire en soi, il est la première nécessité
4. Dieu est le modèle parfait à partir duquel on mesure la vérité ou la fausseté de toutes choses. Il y a forcément quelque chose qui est souverainement vrai, souverainement bon, souverainement noble, et par conséquent aussi souverainement être, car, comme le fait voir Aristote dans la Métaphysique, ce qui est souverain en vérité est aussi souverain quant à l'être
5. Dieu est le guide intelligent de toutes choses : « Nous voyons que les choses privées de connaissance comme les corps naturels agissent en vue d'une fin, ce qui nous est manifesté par ceci que toujours, ou le plus souvent, ils agissent de la même manière de façon à réaliser le meilleur : d'où il apert que ce n'est point par hasard, mais en vertu d'une tendance déterminée qu'ils parviennent à leur fin. Or, ce qui est privé de connaissance ne peut tendre à une fin que dirige par un être connaissant et intelligent, comme la flèche par le sagittaire. Il y a donc quelque être intelligent, par lequel toutes choses naturelles sont orientées vers leur fin et cet être, nous le disons Dieu. »[list][*]