2. Connaissance et dévoilement : 3) Importance du thème de l'un et du multiple

Ceci est le sujet d'ouverture de la troisième question posée par Yannick Imbert dans ce chapitre.


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Admin a écrit: 3) Pourquoi le problème de l'Un et du Multiple est-il si important en philosophie ?

Ce problème fondamental exprime la « tragique relations des êtres à l'Être » (in Anaximandre, De la Nature, BRUN, p.28).
Plusieurs questions se posent à l'homme de ce point de vue :
- qu'est-ce qui donne son unité au cosmos ? Pourquoi les particules forment-elles un ensemble cohérent au lieu d'une anarchie chaotique (cf. Genèse 1:2 "La terre était informe et vide") ;
- quel rapport existe-t-il entre une partie (un atome, un être vivant, un homme, etc.) et le Tout cosmique ?

Malheureusement, les Présocratiques pensent que le principe fondamental du grand Tout est interne au cosmos. Ils cherchent la réponse dans un élément naturel fondamental.
Tout comme les visions mythologiques antiques, où les dieux sont soumis au système, mais ne sont pas "ex machina", comme le Dieu créateur et Tout-Puissant que révèle la Bible (Job 38:4 "Où étais-tu quand je fondais la terre ?" ).

Le Christianisme offre une réponse stable à cette déchirante question existentielle : quel est le sens de mon existence particulière, dans l'univers ? L'histoire Création - chute - rédemption présentée par le plan de salut exposé dans l'Ecriture oriente la vie du croyant. La relation à Dieu, par Christ, donne un sens à tout le reste (cf. proposition de Leibniz : chaque homme est sur un rayon, le croyant progresse vers le centre de la roue - Dieu - et se rapproche du même coup des autres hommes).
Mais pour la philosophie, le problème reste posé et débattu...

Effectivement le problème de l'Un et du Multiple c'est aussi celui des êtres à l'Etre ou de l'Etre et de ses "étants" et de leur relation tragique. Le fragment d'Anaximandre indique que "ces "étants" étaient soumis à l'"ordre du temps" pour se rendre justice ou réparation.
L'existence est donc pensée comme une perte, comme l'abandon d'une source primitive. Comme l'écrit Nietzche "Tout devenir est une émancipation coupable à l'égard de l'Etre éternel". Brun p28
Pour Anaximandre il y a l'Apeiron, l'indéfini, l'Indifférencié qui ne souffre pas des limites de l'individu. Et de plus il qualifiait l'Indéfini de divin, d'immortel, d'impérissable, d'Originaire d’où sont issus tous les individus qui s'en sont exilés mais auquel ils finissent par retourner lors de la dissolution finale. Pour lui "l'Apeiron est la seule cause du développement aussi (bien) organisé de notre univers" (Wikipedia).

En parlant de l'Apeiron organisateur de l'Univers, de l'indéfini, du DIVIN, de l'IMMORTEL, de l'impérissable, Anaximandre décrit les principaux attributs de Dieu sans Le nommer.
Sans y faire explicitement référence, Anaximandre pose tout simplement le problème de la relation des hommes après la chute dans le jardin d'Eden avec leur le Dieu créateur de l'Univers.
A ceci près que les individus selon l'écriture ne retourneront pas à Dieu mais iront à la perdition éternelle, sauf évidemment s'ils acceptent le salut, la voix de rédemption que Dieu leur offre.
En résumé, en évoquant le problème de l'Un et du Multiple Anaximandre pose "tout naturellement" le problème ô combien important de la condition humaine par rapport à Dieu et de la destinée de l'homme.
Et ce n'est pas surprenant qu'il y ait eu une école comme les Aléates qui a cherché à nier le Multiple et le Devenir de manière radicale car ce problème SANS LA REDEMPTION était INSOLUBLE pour les Grecs!!

« Les philosophes grecs s’attachèrent à connaitre l’essence,…le problème de l’origine… », p18. La compréhension de l’Un et du Multiple permet donc d’aborder la question de l’origine de la création. Question fondamentale car c’est de cette compréhension que va naitre les différentes visions du monde d’une philosophie, et donc de la manière de vivre d’un homme, voir sa religion. La compréhension de l’Un et du Multiple développe telle ou telle philosophie car il touche la notion d’immanence et transcendance, du divin et de l’humain. Ce qu’on retrouve d’ailleurs plus loin avec les sophistes pour qui désormais « la terre est désormais coupée du Ciel », p 35.

J'avoue que j'ai du mal à répondre à cette question à partir du livre de Jean Brun. Si c'est de la philosophie en générale dont il est question dans la question, j'ai du mal à y trouver la réponse dans le chapitre 2.
Si la question porte sur les présocratique, j'ai du mal également a trouver des éléments de réponse.
Je vais essayer dans un premier temps de tenir compte de ce que vous avez trouver et essayer de relire le chapitre 2 en recherchant une réponse.

Après avoir relu les pages de Brun concernées, il me semble que le problème de l'un et du multiple est important en philosophie car il pose la question de l'existence, et non pas que son origine. Non pas la question d'où je viens, mais pourquoi mon existence.
Il me semble c'est ce qu'Anaximandre veut dire, dans la citation que Brun cite p. 28:

Ce d'où tous les étants tirent leur existence est aussi ce à quoi ils retournent à leur destruction selon l'ordre de la Nécessité. Ces étants se rendent justice et réparation les uns aux autres de leur injustice selon l'ordre du temps.

J'existe à cause de ce passé et de ce futur, et j'existe ceux pourquoi j'existe.
Et ainsi ce qui est important, ce n'est pas l'origine, mais mon existence. Certes, comme le dit Brun, l'existence est une perte, un abandon d'une source primitive. Mais si je comprends Anaximandre, je ne sorts pas de la source primitive, je ne suis pas, je n'existe pas. Mais j'existe dépendemment de cette source: puisque je pars de la source primitive et j'y revient pour me dissoudre (c'est un peu la même conception que dans l’hindouisme: tout part de Brahman et y revient pour s'y dissoudre. C'est l'existence par l'association

Les Eléates vont faire leur raisonnement à partir de l'existence en posant le Non-Être du multiple et du devenir. C'est l'existence par la dissociation.

Parménides, parle de l'existence par le choix: j'existe en choisissant l'une des voies qui m'est offerte. Et en connaissant le contenu de ces voies, car connaître c'est être. L'existence par le choix et la connaissance.

Voilà ce que je pense avoir compris à partir de cette question.

Le rapport entre l'un et le multiple sont fondamentaux :
- faut-il définir l'un par le multiple, l'individu par la société ? Doit-on donc faire porter nos efforts sur la connaissance de l'a société pour connaître l'humain ? Cette connaissance peut-elle être suffisante, même si on juge qu'elle n'est qu'expérimentale ?
- faut-il définir le multiple par l'un ? Dans ce cas, qui représente l'un ? La question est difficile...
- les rapports entre l'un et le multiple dépendent des réponses aux questions ci-dessus ! Mais de la manière des les envisager découlera le fascisme ou l'anarchie.